Nous avons passé nos deux dernières semaines sur les chapeaux de roue, à tel point que je n’ai pas eu le temps d’écrire jour par jour ce que nous faisions. Je suis désormais à Jakarta et je vais essayer tout de même de prendre le temps de me retourner sur ces deux semaines qui ont été riches en émotions, mais peut être plus pauvres en anecdotes comiques.
En effet, à partir du dimanche de notre retour jusqu’au jeudi de notre départ, chaque journée comptait 9h de travail. En général, les journées de travail commençaient à 9h du matin jusque 21h minimum.
Nous débarquons au bureau de StarShea (oui car nous avons appris qu’il y avait une majuscule au milieu du nom de StarShea, comme pour PlaNet Finance... ). Une trentaine de coordinators nous dévisagent: pendant les deux semaines qui vont suivre les coordinators de StarShea suivent une formation. Nous sommes délogés du bureau principal et rejoignons un nouveau co-bureau : Hope qui travaille pour PlaNet Finance. Le bureau est très cosy. Comme vous le savez déjà (peut être) le bureau est une maison, nous sommes donc dans une chambre. Le seul hic: elle est peu éclairée, il faut donc allumer la lumière toute la journée. Malheureusement, la lumière se trouve au dessus du ventilateur.. Un effet stromboscopique nous attend donc ce premier jour. Une négociation s’engage avec Hope, dont nous sortirons vainqueurs ! Plus d’effet stromboscopique ! D’ailleurs, Hope quittera l’entreprise le mardi suivant, sans nous prévenir.
Comme il s’agit d’une formation, les repas seront livrés tout le long de la semaine : fried rice (riz frit) et fish (poisson) pour moi et chicken pour Cécile. Au bout de 3 jours du même régime alimentaire, nous craquons et allons au restaurant manger un peu de salade. D’ailleurs nous commençons aussi à nous lasser de la nourriture de Tamale. Il y a en effet dans les petits magasins autour de chez nous une très faible variétés de produits (et encore plus de produits dont nous sachions nous servir) au menu: oeuf, sardine, riz, pâtes, sauce tomate concentrée, lait, pain, Nesquik, petits gateaux, lait concentré, jus de fruit, huile. Nous pensions au départ qu’aller au centre ville dans un des plus grands magasins nous permettrait de varier un peu notre alimentation, qui tournait grandement autour de ces quelques denrées auxquelles s’ajoutaient les produits frais: 1) tomatess, 2) aubergines (mais trop acides, ce sont de petites aubergines jaunes) 3) pastèque 4) banane 5) très occasionnel: ananas.
Seulement, dans le plus grand magasin de la ville, Quality First, il n’y a beaucoup de produits, mais qui sont tous des variations autour des produits déjà mentionnés: un immense rayon de concentré de tomates, un immense rayons d’huiles différentes, etc... Mais nous trouvons à la sortie du magasin le miracle culinaire: des mangues et des avocats ! C’est une révolution qui nous conduit à manger deux avocats et une mangue par jour, ce qui nous ravit. Nous trouvons aussi des patates ! mets de luxe au Ghana, car elles sont importées. En effet, 3 patates coutent plus cher qu’un ananas. “Ils sont tombés sur la tête” ! Mais notre purée à l’huile d’olive nous réchauffe le coeur.
Nous continuons de travailler au cours de toutes ces péripéties d’arrache pied... Et c’est à ce moment qu’intervient un sinistre personnage: la coupure d’eau. Seule solution les premiers temps: se laver avec l’eau contenue dans la chasse. Une fois celle-ci vidée, j’achète un sac entier (deux sacs en fait) de pure water, ces petits sachets d’eau (comme un coussin rempli d’eau). Nous nous douchons avec.
La présentation avance tout de même, nous sommes aidés par les filles qui sont à Paris et nous assaillons Anna de questions sur StarShea, car c’est au moment de la rédaction que nous nous rendons compte que StarShea a un fonctionnement plus complexe que prévu. Elle répond patiemment à nos questions et rassasie notre curiosité. Le rapport sera bientot en ligne sur le site de Planète d’Entrepreneurs ainsi que sur le blog... Cela a tout de même été un long et douloureux processus d’accouchement. Nous étions tellement obnubilés par sa rédaction que nous avons failli rater plusieurs événements majeurs et qui me semblent emblématiques de la vie à Tamale.
Le samedi après midi, la ville de Tamale s’arrête, dans le lointain résonnent des coups de feu, et nous dépassons en taxi un cortège mené par deux hommes à cheval qui agitent d’immenses parasols circulaires. Ce sont de jeunes hommes, qui sont bardés de fusils pointés vers le ciel, dans des semi-uniformes militaires colorés. Nous arrivons en ville: juste à côté de la maison du chef de Tamale deux grands cercles faits de chaises en plastiques attendent d’augustes fesses. La maison du chef est étonnement petite, nous pouvons rentrer dans la cour, elle ne fait que deux fois la taille des maisons que nous avons vu dans le plus banal des villages, elle fait presque quasiment la taille de notre maison de Tamale (ou de ma maison de Saint Jean de Védas). Les chaises se remplissent petit à petit. Ce sont des chefs et leurs femmes des villages alentours qui se réunissent. Les hommes ont des chapeaux de shtroumf dorés la plupart du temps, avec des vestons bouffants qui ont l’aspect de jupes de collégiennes anglaises. Ils portent des montres dorées et des lunettes de soleils rayban. Ils ont aussi des boots de cowboy multicolores ! Enfin l’assemblage est vraiment beau. Les femmes sont habillées plus classiquement: des points communs émergent moins facilement, mais elles sont toutes très maquillées, leurs vêtements sont faits de lourdes étoffes mordorées et le haut de leur vêtement est souvent blanc. Nous n’avons pas fini d’observer tout ce manège que les coups de feu se rapprochent. En réalité le cortège escortait d’autres chefs à cheval. Apparemment le festival: Dagomba festival, consiste en une réunion de chefs au cours de laquelle tout le monde tire en l’air. Nous sommes un peu affolés et les tirs incessants nous fatiguent. Nous décidons de rentrer à la maison, assez difficilement car nous n’arrêtons pas de croiser des groupes qui tirent à blanc.
Nous retournons donc travailler dare dare. Nous bataillons avec les calculs des revenus des femmes tirés des noix et tirés du beurre. Mais à 21h, c’est l’heure de sortir et de faire une pause au milieu d’un week end bien studieux.
Nous nous rendons au Giddypass, invités par Efe à une soirée de départ de l’une de ses amies expatriées. Il s’agit d’une Canadienne, très sympathique. Nous étions très motivés à l’idée de “s’inscruster” à cet événement, car ce soir son petit ami ghanéen Rauf va lui faire sa demande en mariage. Or cela fait 6 mois qu’ils sont ensemble. La soirée est très sympathique: musique à plein volumes, tubes ponctués de klaxons (comme en Jamaîque). Et d’un seul coup, la meilleure amie canadienne de la future mariée prend le micro, et demande avec un fort accent américain “Everybody please leave the danceflooor” (“Sortez tous de la piste de danse!”. En effet, la piste est encombrée d’expatriés et de ghanéens (et de nous). Un rond se forme, et là le futur marié prend le micro, commence un long discours ponctué par les personnes environnantes de “Go to the point” (demande lui!) et de “Come on man” (Allez mon gars!). Mon voisin s’échauffe, je lui demande s’il connaît les tourtereaux: il me répond qu’il vient d’Accra, et qu’il ne les connaît pas. Et à un moment indistinct, sous les coups de klaxons répétés, l’australienne fond en larme, elle accepte ! Leurs amis forment une double rangée, et entrecroisent des roses et le couple passe sous le pont qui se forme. Ils arrivent face à une table en plastique, où se trouvent deux bouteilles de champagne de 50 cL et un coeur de bougies de tables. Ils soufflent les bougies, se servent du champagne et boivent en entrecroisant les verres ! On se croirait dans le Bachelor (émission de TF1). C’est un peu le point d’orgue d’une soirée, je suis à la fois moqueur mais ils sont touchants et ils ont l’air sincères ! De plus, ils nous ont accueillis tous les deux très sympathiquement. Nous rentrons à la maison, et le lendemain matin, réveil à 9h pour reprendre le travail !
Peu de choses à raconter sur la semaine suivante, mis à part que nous travaillons beaucoup ! La présentation sera finalement le jeudi matin à 10h. Nous ne dormirons que de 3h du matin à 7h du matin, pendant que les filles en France se coucheront à 7h. En effet, “l’équipe de nuit” ne présente pas le lendemain et du coup peut travailler durant cet intervalle de temps.
La présentation se passe bien ! Anna nous félicite, tout en continuant de nous challenger sur nos recommandations !
Jeudi midi, le stress tombe, et nous sommes sur les rotules ! Mais ce n’est pas la fin de nos aventures car nous avons appelé la compagnie aérienne que nous prenons le lendemain, et les avions sont cloués au sol pour toute la semaine !
En effet, Tamale est dans une saison qui est l’Harmattan : il y a du vent, et beaucoup de poussière. Nous sommes recouverts de poussière et surtout, les avions n’ont pas assez de visibilité pour décoller. Je pensais pourtant que les avions fonctionnaient quasi-automatiquement et se répéraient grâce à leur systême de navigation, ceux-ci doivent être absents dans les vieux coucous qui assurent la relation Accra-Tamale. Cela me fait penser à mon oncle Fernando, contrôleur aérien... Il pourra sûrement m’en dire plus à ce sujet à mon retour.
Je pars donc en expédition à Tamale à la recherche d’un bus qui partirait le vendredi à 17h: si l’avion part quand même nous prendrons l’avion, s’il ne part pas nous prendrons le bus et arriverons à l’heure pour notre avion, qui part samedi à 20h d’Accra pour Jakarta.
Première station de bus: bus complet. Deuxième station de bus: le bus part à 16h. Dernière station, il part à 11h30, et le personnel là bas m’assure qu’un pont sera fermé le soir sur le chemin... Je ne sais pas qui croire, j’appelle Anna, qui demande à une personne de confiance. Celui-ci nous conseille de... Faire confiance aux compagnies de bus !! Par sécurité je réserve le bus qui part à 11h30. Nous faisons donc une croix sur le retour en avion qui prend 1h30, et devant nous 12h de bus de nuit! Anna pourra se servir des billets d’avion, et peut donc nous les rembourser.
Jeudi soir, diner d’adieu très sympathique. Je regrette un peu de ne pas avoir découvert plus tôt les personnes présentes autour de la table, qui sont des connaissances mais avec qui nous aurions sûrement pu devenir amis. En entrée, concombre au yaourt, en plat poulet avec purée (je ne mange pas le poulet), et en dessert salade de mangue et crumble aux pommes !
Le lendemain réveil pour faire notre valise. Nous retournons aussi à StarShea pour dire au revoir à toute l’équipe. Une fois arrivés nous recevons un coup de fil de la compagnie de bus: le bus est décalé à 17h... Le pont s’est rouvert par magie. Cela nous permet de travailler dans un café wifi !
Le bus part bien à 17h de la place de marché. Cette fois pas de publicité, juste des clips chrétiens pendant les 2 premières heures. Il existe apparemment une incroyable variété de chansons religieuses, mais à la sauce moderne. “My loooord jesus”. Et les deux heures suivantes des chansons ghanéennes et nigérianes langoureuses nous attendent. Premier stop: une roue crevée qui est remplacée au pied levé. Deuxième stop: une autre roue crevée remplacée. Troisième stop: un autre roue crevée, et il n’y a plus de roue de secours. La compagnie se décide à envoyer un nouveau bus... Nous changeons de bus à 4h du matin et arrivons finalement à Accra à 9h du matin. Parmi les récriminations de tous les passagers j’ai réussi à faire baisser la musique! Et même par la suite à leur demander de l’éteindre! Nous passons la journée à Accra, un peu crevé mais nous voulons profiter de nos derniers jours: nous achetons des sacs trashybags, buvons un dernier smoothie et c’est parti pour l’avion !!
Rien de spécial sur ce trajet en avion, si ce n’est qu’il dure 24h, du samedi à 20h jusqu’au lundi 6h du matin (24 réelles, le décalage horaire s’y rajoute). Nous dormons d’abord 4h jusqu’au Caire, où nous arrivons à 4h du matin... Nous nous endormons sur une couverture posée sur le sol jusque 6h du matin, et nous allons dans un autre terminal. Nous décidons de bosser jusque midi sur le rapport StarShea ! A midi, nous rentrons dans un nouvel avion, direction Dubaï et son aéroport ultra-moderne (wifi par exemple !). Ensuite dernier avion de 8h pour Jakarta où nous pouvons faire un semblant de nuit.
Anecdote marrante: lors de notre escale au Caire, j’utilise les toilettes de l’aéroport. Je souhaite tirer la chasse, mais impossible de trouver la manette. Quelqu’un frappe à ma porte, et ensuite à toutes les portes: une personne est préssée. J’ouvre ma porte, en pensant peut être que la personne saura m’aider. 3 secondes plus tard, je trouve une sorte de molette ! Je l’enclenche, un jet puissant me passe derrière les jambes: je suis trempé ! Et là je me retourne... Le monsieur qui attendait est recouvert d’eau sur tout le haut du corps, douché. J’ai activé sans faire exprès le tuyau pour se nettoyer les fesses... Le jet était si puissant qu’il l’a arrosé. Toutes les toilettes retiennent un fou rire, et je pars penaud pour raconter mon histoire à Cécile !
Prochaine étape Jakarta !