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Brèves de Dar

Enfin arrivées en Tanzanie, notre première étape ! Dès la sortie de l’avion, nous sentons que l’air de la nuit est différent, et nous réalisons enfin que c’est bon, c’est parti pour un bon bout de temps, et qui sait ce qui va nous arriver… !

Petites bribes et nouvelles de là où nous vivons depuis déjà deux semaines...

Little Italy

Première bonne surprise: notre hôtel, ou plutôt pension de volontaires. Il s’agit en fait d’une ONG italienne, CEFA, qui a des activités en Tanzanie et gère entre autres cette pension abritant toute une famille, un bureau, et des clients volontaires de passage à Dar. Dès le deuxième jour, les allées et venues des diverses personnes qui peuplent la pension, affairées à on ne sait quoi et passant sans effort d’une langue à l’autre (italien, swahili, anglais, allemand…) nous déconcertent. Un petit garçon blond interpelle ses amis en swahili; de jeunes acteurs tanzaniens occupent la cour; une Allemande expatriée surveille ses quadruplés, adoptés ici; des enfants regardent Tom&Jerry sous le martèlement des machines à coudre; un petit chaton noir se fait les griffes sur nos baskets et nos jeans; le réceptionniste nous parle de sa vocation d'ingénieur; une Américaine de sa passion des chimpanzés; des doctorants et volontaires perchés nous exposent leurs projets - incompréhensibles – d'un ton enthousiaste ou mélancolique. C'est bon, on est tombées au bon endroit, on a hâte de poursuivre cette galerie de portraits...

On prend rapidement nos habitudes: comment marche la climatisation, dans quel coin d'hôtel peut-on espérer capter un peu de wifi (notre téléchargement d'Out of Africa sera fini dans deux ans, apparemment), nous repérons le Mbalamwezi beach club (K-Pop au programme), comparons la fraîcheur des brochettes de chèvre des différents bouis bouis... Au bout de quelques jours de régime viande-frites-coca (variante: viande-riz-coca), classique tanzanien, on déniche les endroits qui incorporent un peu de légumes dans leurs sauces, quémandons quelques haricots, et décidons même de faire du sport avec la clim à fond dans notre chambre. Manque de chance, l'eau sera coupée au même moment dans tout l'hôtel: les 24h qui ont suivi furent … odorantes

Mud ou les rives de Ubungo

Afin de voyager un peu avant le début de la mission, nous décidons d'aller dans le Nord du pays. Départ pour Moshi, bourgade au pied du Kilimanjaro, à 6h du matin depuis la gare routière d’Ubungo. Un premier trajet à cette gare deux jours plus tôt, afin d'acheter les billets, s'était soldé en un échec cuisant (coincées et asphyxiées en dalla-dalla pendant 1h30 dans les embouteillages, nous n'avions même pas réussi à atteindre la gare). Le jour du départ nous croyons donc être au bout de nos peines en atteignant la gare si facilement (évidemment, à 5h du mat un dimanche..) mais cette illusion se dissipe rapidement face à cet enfer boueux sur-bondé, où la pression monte de tous les côtés: les gens courant de partout, les cars qui se bousculent, les rabatteurs qui nous crient dessus et nous emmènent de force (à vrai dire notre résistance était nulle, voulant atteindre le plus vite possible notre destination). Anne-Charlotte, qui se débat en tongs dans la boue, fait des détours pour éviter les grosses flaques: on lui crie de revenir, et le rabatteur se joint à nous « Anne-Chouwa ! Anne-Chouwa ! ». Une fois la gare traversée, épuisées, presque impatientes de se réfugier dans un bus pour les prochaines 10 heures, on nous annonce que nous ne sommes pas au bon endroit et que nous devons prendre un bajaji. Après une délibération désespérée de 5 minutes (« est-ce qu’on nous mentirait, est-ce que le bajaji est dans le coup, c’est écrit Ubungo sur le billet pourtant »), on saute dans le bajaji avec nos 5 sacs à dos, notre rabatteur à nos trousses. Enfin nous trouvons notre bus et nous installons dans un confort discutable pour un voyage d'une journée...

Errements de Muzungus

Depuis que nous sommes ici, nous avons opéré un véritable changement d'identité, à double titre: tout d'abord, sous la menace terroriste francophobe (la Tanzanie figure sur la nouvelle liste rouge du quai d'Orsay), nous nous faisons régulièrement passer pour des Belges. Faute de connaissance sur la Belgique (à part les habitudes culinaires et quelques blagues non pertinentes), nous nous trouvons toutefois rapidement coincées: foot, système politique, culture, langue flamande et pensons abandonner ce rôle prochainement (le Québec est en lice).

Ensuite, nous nous sommes malgré nous fondues dans la large catégorie de « Muzungu », mot qui désigne tous les Blancs et les occidentaux (et, par extension, les Tanzaniens très aisés). Nous l'entendons souvent sur notre passage, et parfois on nous interpelle avec. Littéralement, muzungu veut dire en swahili « quelqu'un qui erre sans but » (à méditer).

L'identité de Muzungu vient avec ses avantages et ses inconvénients: l'inconvénient le plus grand est d'être confondu avec une vache à lait, une proie facile, et de s'attirer des ennuis (comme nos concitoyens Muzungu ne manquent pas une occasion de nous le répéter). On reparlera de ça et de nos soucis avec l'immigration tanzanienne, machine impitoyable à traquer les Muzungus clandestins...

D'un autre côté, quasiment chaque Tanzanien que nous croisons dans la rue nous salue et nous demande comment nous allons: soit par un Habari (bonjour comment ça va?) chaleureux, soit par un Mambo (ça roule?) furtif dans notre dos. On répond Nzuri (ça va super) ou Poa (cool gros) selon le cas, et on voit à chaque fois la personne nous sourire à pleines dents, comme si elle ne suspectait pas une seconde qu'on lui réponde. C'est le bon côté des choses: si par hasard on croise un mendiant qui nous alpague, ou une personne nous abordant avec rudesse, à partir du moment où un mot de swahili est prononcé, le visage en face s'éclaire, la bonne humeur se déclenche, une transformation s'opère.

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